Port de la Rochelle : le cargo Gargantua s’invite à quai

Quinze jours pour charger le cargo « Aquitania G ». Arrivé hier, il attend 97 500 tonnes d’orge fourragère

Tel un ventre insatiable, l’« Aquitania G » réclamera entre dix et quinze jours pour se remplir des milliers de mètres cubes d’orge fourragère qui lui sont promis. 97 500 tonnes, très exactement qui, converties en rendement cultivé à l’hectare, enverront dans les cales de Gargantua la production de… 20 000 hectares. Vertigineuse perspective que le groupe Sica Atlantique, qui stocke ce grain et va le charger à compter de ce matin, 6 heures, étalonne en record : celui du plus gros chargement d’un navire en totalité réalisé depuis la création de l’entreprise, en 1957. Dans dix à quinze jours, il appareillera pour l’Arabie Saoudite, où la cargaison nourrira du bétail.

Demi-tour dans l’avant-port, pour remettre le cargo dans le sens du départ

 Forte prise au vent

Il était 15 h 40, hier, quand les lamaneurs, ces spécialistes de l’amarrage des cargos, ont achevé leur manœuvre, le long du quai Modéré-Lombard, le terminal céréalier du Grand Port maritime de La Rochelle. Signal de fin pour Thierry Warion, le pilote maritime qui avait guidé les pas de ce céréalier, charpenté en Corée du Sud en 2010, et battant pavillon italien. Les trois remorqueurs Boluda mobilisés pour lui servir de béquille, regagnaient aussi leur poste à quai. Attentif et impressionné, le directeur général de Sica Atlantique, Vincent Poudevigne, assistait depuis le quai, aux opérations. Et il s’en régalait.

Cela faisait quinze jours que tous les services aux navires du port, et Pierre-Jean Huré (Agence maritime Thomas), le représentant de l’armateur, avaient préparé cette escale du géant. 255 mètres de longueur, 43 mètres de largeur. S’il n’est pas le plus gros des cargos accueillis ici, celui-ci pointe tout de même dans le haut du tableau. Et lorsque le vent s’en mêle, la manœuvre prend un relief singulier, les superstructures très hautes sur l’eau (le radar à près de 30 mètres de la surface), handicapant sa marche en raison de la prise au vent. C’est pour cela qu’un seuil de refus du navire au port, à 25 nœuds de vent, avait été calculé. Et c’est par respect de ce garde-fou que l’accostage initialement fixé pour samedi dernier, était repoussé à hier après-midi. La force du vent établi à 20 nœuds se maintenait alors sagement en dessous de la limite. L’« Aquitania G » qui avait appareillé de Rotterdam, cales vides, en milieu de semaine dernière, s’était présenté dans le pertuis d’Antioche, après 48 heures de navigation, vendredi soir dernier.

Exceptionnelle préparation

Au-delà du record, tout, dans cet accueil, est spécifique. Afin que le navire n’ébranle pas le quai à l’accostage, et passe sous le seuil de tolérance fixé à 50 000 tonnes, il a fallu vidanger les ballasts avec lesquels il s’équilibre. Dès que ses aussières furent assurées, ces réserves étaient à nouveau remplies, pour abaisser l’assiette du navire. Sans cette manœuvre, le bras du portique de chargement du grain ne passerait pas au-dessus des cales. Un outillage qui a aussi été adapté à la taille du navire. Le grain y sera propulsé à une cadence maximale de 1 000 tonnes/heure.

« C’est le fait que La Rochelle soit le seul port en eau profonde de l’Atlantique qui permet ce chargement. Nous avons un tirant d’eau admissible de 13 mètres, plus la hauteur de marée. L’« Aquitania G », en pleine charge, partira avec un tirant d’eau de 13,10 à 13,20 mètres », éclaire l’agent maritime, Pierre-Jean Huré. Une évaluation qui laisse dire que le cargo céréalier, cales garnies, saluera la Pallice à la pleine mer.

Source Sud Ouest 16/07/2012
Par Philippe Baroux


Aquitania G, à l’entrée du Port Atlantique La Rochelle par T.WARION (Pilote Maritime)