Le Seamen’s club, le “Havre” de paix des marins en escale

Depuis 30 ans, l’association havraise d’accueil des marins apporte du réconfort aux 200 000 marins qui, chaque année, font escale au Havre et se réfugient au Seamen’s club. Récit.

L’Hôtel-Restaurant des Gens de Mer, véritable institution havraise, accueille une association qui, si elle est peut-être un peu moins connue, est considérée par la communauté maritime internationale comme une véritable bouée d’ancrage : le Seamen’s club. Son rôle : accueillir tous les marins qui font escale au Havre.

« Nous avons un chauffeur qui, lorsqu’ils ont la possibilité de descendre à terre, va les chercher gratuitement pour les transporter jusqu’à nous », explique José Perrot, le secrétaire de l’association havraise de l’accueil des marins, qui gère le Seamen’s club.

Au Havre, selon l’intensité du trafic maritime, 100 à 200 000 marins font chaque année un passage au Havre. Beaucoup s’arrêtent au  Seamen’s Club. Toutes les nationalités sont confondues. L’anglais s’impose pour faciliter les échanges.

« C’est la langue maritime que chacun pratique avec son accent, avec sa grammaire. Mais tout le monde s’entend », rit le trésorier de l’association.

Un lieu pour entrer en contact avec les siens


S’ils n’ont pas leur propre matériel, les marins disposent de cabines équipées pour entrer en communication avec les leurs.

Dans cet antre particulière, des mondes se croisent, portés le plus souvent au masculin, même si la profession se féminise. Ici, les hommes viennent souffler autour d’une bière et de la présence chaleureuse des membres de l’association. Le tumulte de la vie à bord s’estompe ; les marins s’accordent jusqu’au plaisir de l’oisiveté. Il ne sera de toute façon que de courte durée.

« Pour les porte-conteneurs qui arrivent à Port 2000, les escales n’excèdent jamais plus de 12 heures. Et sur les vraquiers ou encore les navires rouliers, les escales sont de 6 à 8 heures seulement », concède Ethel Mpacko, trésorier du Seamen’s club.

L’association havraise reconnaît à propos, avoir des difficultés à aller chercher les marins en escale à Antifer, du fait de l’éloignement du port. Un regret pour ces bénévoles très attachés à la cause maritime, qui savent combien ces temps de pause sont essentiels pour des hommes qui embarquent parfois pour neuf mois de mer, sans voir leur famille. Les Philippins, les Indonésiens, les Indiens – « toutes les nationalités d’Orient, en fait » – sont les plus touchés par cette situation.
Le Seamen’s club leur offre alors la garantie de pouvoir renouer le contact avec leurs proches. L’association, quand ils n’ont pas leur propre ordinateur, leur loue des espaces dédiés où pour 1 euro, ils profitent d’un accès à Internet et à Skype, pendant trois heures. Côté salon prennent place les marins équipés de leur propre matériel. Casque vissé sur la tête, l’écran d’ordinateur face à eux, ils conversent enfin dans leur propre langue avec les leurs. Les visages s’éclairent souvent d’un grand sourire.

Au Havre, ils achètent des souvenirs de Paris

Pour Léo Gene et Elmer, deux marins philippins, le Seamen’s club est la garantie d’un bon moment de pause.

« Ici, c’est vraiment sympa ! ». Léo Gene et Elmer, deux marins philippins qui jouissent de l’endroit depuis une semaine – un fait presque exceptionnel – se prélassent dans les généreux canapés, une bonne bière servie à leur table. Ce qu’ils préfèrent ici ? D’une seule et même voix, ils lancent « Skype ! », pour aussitôt se raviser et parler de la sympathie des gens qui les accueillent. Cette halte salvatrice leur donne aussi l’occasion d’acheter quelques souvenirs. Mais au Seamen’s club, on ne trouve pas de magnet de l’église Saint-Joseph…il n’y a que Paris qui est représenté dans la gamme d’articles proposés.

« Beaucoup de marins qui arrivent ici sont persuadés que Paris est tout près. Ils s’imaginent que Le Havre est à cinq minutes de la capitale. S’ils n’ont pas le temps d’y aller, ils veulent tout de même revenir chez eux avec un souvenir de Paris », s’amuse Germain Basse, le responsable de l’Hôtel des Gens de Mer.

Il est aussi un acteur important de l’association. Ce spécialiste de l’hôtellerie-restauration, arrivé en 2007 dans l’aventure havraise, n’aurait dû rester que trois mois, pour un dépannage. Ce mélange d’Amérique du Sud et d’Allemagne est une vraie personnalité en soi.

« À chaque grande fête comme Noël ou Pâques, il ne résiste pas au plaisir de préparer un grand repas pour les marins. Il nous aide vraiment à les sortir de leur ordinaire, à leur faire oublier la boîte de taule dans laquelle ils passent la plupart du temps », se félicite José Perrot.

Le Seamen’s club en quête de bénévoles

L’association fait beaucoup mais elle aimerait faire plus encore. Son souci majeur est d’arriver à réunir le plus de bénévoles pour faire fonctionner ce lieu de vie si particulier en totale adéquation avec le rythme des passages des bateaux. En soi, rien de simple !

« Nous ouvrons tous les jours de 16 heures à 23 heures. Mais il faudrait que nous arrivions à nous caler sur le rythme des escales qui intervient désormais plutôt entre 6 heures du matin et 22 heures », détaille le secrétaire de l’association.

Le Seamen’s club compte deux salariés et une centaine de bénévoles, parmi lesquels une vingtaine d’actifs. Mais il lui faudrait encore plus de bonnes volontés pour parvenir à une plus large ouverture de l’accueil aux marins. L’appel est lancé. Une seule condition s’impose : savoir parler l’anglais.

  • Infos pratiques : 
    Association havraise de l’accueil des marins , Maison des Gens de Mer, 44 rue Voltaire au Havre
    Tél : 02 35 21 80 79
    Permanence tous les mercredis de 18 à 19 heures

Source:
Auteur : Karine Lebrun – journaliste à Le Havre Infos